Le village vietnamien porte une belle tradition et a toujours un rôle à jouer aujourd’hui.
Jadis sous les régimes féodaux, le village fut indépendant vis-à-vis de la Cour. Cela se résume dans un proverbe très populaire : les règlements imposés par le roi cèdent aux coutumes des villages. En effet, chaque village a ses conventions (hương ước, collection des règles de conduite édictées par les villageoises) et sa petite cour (Hội đồng kì mục, conseil des notables). Pour illustrer cet aspect, il suffit de lire ce que Paul Doumer a écrit en 1905, après 5 ans d’exercice de ses fonctions de Gouverneur général de l’Indochine : « Pour moi, maintenir l’intégralité, voire développer encore davantage l’organisation vieillotte que nous avons vue est une bonne chose. Selon cette structure, chaque village sera une petite république indépendante dans les limites des droits régionaux. C’est une collectivité avec une organisation très stricte, ordonnée et vis-à-vis des instances supérieures, responsable des individus qui la composent, individus que le pouvoir supérieur ne peut pas connaître, et ce sera une chose très commode pour le travail de l’administration. »
Les images représentatives des anciens villages vietnamiens sont la haie de bambous, la maison communale (đình), un point d’eau (bến nước) et un grand banian (cây đa).
Tout d’abord, la haie de bambous, renforcée parfois par un remblai de terre battue et par un fossé, transforme le village qu’elle entoure en une île verte au milieu d’une mer de rizières. Elle protège les habitants contre les pirates et autres malfaiteurs ainsi que les typhons. Elle fournit un matériau important (voire essentiel) de construction.
Le đình fut le lieu des affaires administratives (le conseil des notables, le conseil des administrateurs, lieu d’arrêt des mandarins en visite des villages), des activités culturelles (toutes les fêtes et cérémonies s’y tiennent) et de culte (on y pratique le culte du génie tutélaire du village). A noter que cette structure existe aujourd’hui dans les hauts plateaux du pays sous forme de nhà rông, espace commun de la communauté.
Ensuite, le point d’eau, le plus souvent un puits. Là où les femmes et les filles venaient laver du linge et puiser de l’eau pour en apporter à la maison.
Et enfin le banian pluriséculaire souvent au centre du village ou au milieu des champs, au pied duquel il y avait un petit autel toujours enfumé d’encens pour le culte des génies et une buvette où se reposaient les paysans pendant leur journée de travail aux champs.
Aujourd’hui, le village s’adapte aux nouvelles conditions de vie. Bien que l’individualisme tende à gagner du terrain, les relations de voisinage demeurent strictes.
Les villageois se connaissent bien en général. Aller chez un voisin pour prendre du thé et pour faire une conversation est une action de tous les jours des gens qui habitent à la campagne. On est de plus prêt à faire partager des expériences de réussite aux autres. On peut trouver du conseil, de la consolation, de la compréhension…S’entraider s’inscrit dans l’art de vivre.
Lorsqu’une famille a une affaire importante – marier sa fille par exemple – les gens du village viennent lui donner un coup de main pour les préparations qui sont entreprises un ou deux jours avant la cérémonie formelle. Il n’est alors pas nécessaire de faire appel à un fournisseur de services. D’autre part, il n’est pas rare d’emprunter, pour un certain temps et sans devoir payer un taux d’intérêt, de l’argent à un voisin.
Le peuple aime follement les connaissances et on en facilite les voies : les gens d’un village peuvent verser une cotisation pour venir en aide aux enfants qui rencontrent des difficultés financières mais qui sont brillants à l’école.
Et enfin les rumeurs dans le village ont encore de l’influence et parfois cela aide à changer positivement.